Longtemps Noël fut synonyme de désespoir pour Micberth, un chagrin mêlé de révolte qui remontait à son enfance maltraitée. Il s’appliqua néanmoins toujours à faire vivre des fêtes somptueuses et mémorables à ses enfants, à sa mesnie, à sa famille. S’il existe beaucoup de photos des années 1970-1980 qui fixent la magie de l’instant et la beauté du décor, on ne trouve pas (ou peu) d’écrits sur cette sainte horreur de Noël. Le texte qui suit fut publié sur « Mégalo » (journal télématique) le 27 décembre 1989 et repris dans « Micberth et les gros niqueurs ».

 

Je rame, je rame...

 

« Je serai bref. Ce Noël aura été, à l’image des événements internationaux, pour moi, épouvantable.

« Cela prouve au moins une chose, l’expérience n’est pas une armure contre les mauvais coups du sort. Plus on prend de l’âge et moins on est protégé. Je vais devoir me plonger dans le thème astral de Ceausescu, Noriega et le mien pour y trouver des signes parlants, ou l’astrologie n’est qu’un torche-cul. Ce qui n’est pas à exclure.

« Je mâche de l’anthracite. Et c’est pas bon la houille ! Vais-je demander à Princesse de me remplacer et de mâcher, pour moi, ma grosse paire de houille ? Whoooaf ! Vous constatez le niveau...

« J’y ai même été de ma petite tendresse pour les révoltés roumains et plaf, j’apprends qu’ils assassinent « le génie des Carpates » et sa bonne femme, après un simulacre de jugement qui aura duré deux heures.

« J’apprends que le gouvernement de salut public institué par la révolte ne serait que la vilaine bande recomposée des anciens malfaiteurs communistes. Etc. »

« Parce que j’avais un gros chagrin personnel au coeur, à 44 ans, je viens une nouvelle fois de croire au père Noël et de me faire enculer par ces satanées images qui sont plus menteuses, vilainement menteuses qu’un gamin mythomane.

« Je me décerne à l’unanimité un énorme bonnet d’âne d’honneur. »

 

Pourtant Micberth finira par se réconcilier avec Noël dans les années 2000. Il nous laisse quelques lignes, par exemple, le 25 décembre 2011, sur Facebook : « 66e Noël ! En famille restreinte. Que du vrai bonheur pour le pater familias debout sur la berge du Styx, caressant le chien à trois têtes et déconnant avec Caron. » Ou encore, le 24 décembre 2012 : « 16:33. Je descends dans la salle à manger pour voir comment la table (du réveillon de Noël) a été dressée. Avec un peu de nostalgie animique. Je sais que c'est pour nous, châtelains, nos dernières fêtes. Bientôt la crasse révolutionnaire aura chassé les socialistes du pouvoir et envahira les propriétés des petits hobereaux, gentilshommes campagnards. Les ploucs à la lanterne ! Mon corps sera déchiqueté par les gueux alors qu'un petit vilain sautera dans la foule avec au bout de sa pique sanglante, ce qui restera de mon pauvre crâne. Dans la famille, on vit ça tous les deux cents ans. C’est dire qu'on a l'habitude. »


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Noël 2012 sera son dernier. La photo ci-dessus, datant du 25 décembre 2012, fut l’une de ses dernières. Micberth a traversé le Styx avec la complicité de ce connard de Caron.